L’inspection du travail ne peut autoriser le licenciement économique d’un salarié protégé en se fondant sur la volonté de celui-ci de quitter l’entreprise. Le salarié protégé ne peut ainsi renoncer à sa protection exceptionnelle d’ordre public (CE, 02 juillet 2014, n°368590).
Il est énoncé comme principe qu’au cours de son mandat, un salarié exerçant des fonctions représentatives dans l’entreprise dispose d’une protection spéciale contre le licenciement. On parle ainsi pour le désigné de « salarié protégé ». Pour que le salarié ainsi protégé soit licencié, l’employeur doit disposer de l’autorisation préalable de l’inspection du travail. En cas de refus, le salarié est maintenu à son poste. Dans le cas contraire, la rupture sera considérée comme un licenciement nul.
Dans l’affaire qui a amené le Conseil d’Etat à statuer, l’inspecteur du travail avait autorité le licenciement pour motif économique d’un salarié protégé en prenant pour seule et unique fondement réel, celui de la volonté du salarié de quitter son entreprise. En effet, le motif économique du licenciement était infondé et l’employeur n’avait pas respecter son obligation de reclassement.
Le tribunal administratif qui avait statué en premier instance a annulé la décision de l’inspection du travail au motif qu’elle autorisait le licenciement économique d’un représentant du personnel. L’employeur a constaté cette décision devant le Conseil d’Etat.
Le contrôle de l’inspection du travail sur les motifs invoqués
Une fois saisi d’une demande d’autorisation de licencier un salarié protégé pour motif économique, l’inspecteur du travail doit contrôler :
- l’absence de lien entre la décision de rompre le contrat et les fonctions représentatives du salarié;
- la réalité du motif économique : la situation économique de l’entreprise doit justifier la mesure et avoir des conséquences sur les emplois;
- l’existence et la pertinence de propositions de reclassement faites par l’employeur.
En l’espèce, ces éléments nécessaires à fonder une demande de licenciement économique n’étaient pas établis. Dans un premier temps, l’inspecteur du travail en a déduit que « l’autorisation devrait être refusée ». Pourtant, il a finalement autorisé le licenciement en se fondant entre autres sur la volonté ferme du salarié de quitter l’entreprise.
Or, un licenciement pour motif économique est une mesure prise à l’initiative de l’employeur.
C’est pourquoi, par sa décision du 2 juillet 2014, le Conseil d’Etat rappelle (CE.01 février 1995, n°143.661, Société Midica et CE.17 octobre 1997, n°162.597, Banque industrielle et immobilière privée : l’accord exprès du salarié ou sa volonté de quitter l’entreprise ne sont pas des éléments pris en compte pour le contrôle de l’inspection du travail) que la volonté du salarié de quitter l’entreprise n’a pas à être prise en compte.
Dès lors que les conditions d’autorisation d’un licenciement économique n’étaient pas réunies, l’inspecteur du travail aurait dû refuser la rupture. Le Conseil d’Etat a donc confirmé que le licenciement ne pouvait être autorisé sur ce motif.
L’inspecteur du travail ne peut prendre en compte la volonté du salarié de quitter l’entreprise pour accepter le licenciement pour motif économique
Le Conseil d’Etat considère qu’un salarié protégé ne peut demander à l’inspecteur du travail d’autoriser son licenciement, car sa protection est d’ordre public. En conséquence, l’inspection du travail ne pouvait se fonder sur la volonté du salarié (De la même façon, la chambre criminelle de la Cour de cassation avait déclaré nulle une transaction antérieure au licenciement, par laquelle les salariés protégés avaient renoncé par avance à leur protection (Cass.crim.31 janvier 2006, n°05.83089).) pour autoriser le licenciement. D’autant que le salarié aurait pu proposer à son employeur une rupture conventionnelle.
Dans ce cas, la volonté du salarié protégé retrouve sa place. En effet, dans le cadre d’une demande de rupture conventionnelle, l’inspecteur du travail doit apprécier la volonté du salarié protégé pour autoriser ou non la rupture de son contrat (art. L.1237-15 du Code du travail).
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