En matière prud’homale, la preuve est libre. Cela signifie qu’employeur et salarié peuvent verser au débat tous types de preuves (témoignages, attestations, correspondances). Attention cependant: les éléments de preuve soumis au juge ne doivent pas avoir été obtenus de manière frauduleuse ou déloyale.
La charge de la preuve devant le Conseil des Prud’hommes
Selon l’article L. 1235-1 du Code du travail, en cas de litige, il appartient au juge « d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur« . Il « forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. » Par ailleurs, « en cas de doute, il profite au salarié« . Il ressort de ce texte que le juge peut avoir recours à des expertises ou ordonner la production de documents.
Chacune des parties doit prouver les faits qu’elle invoque.
Les modes de preuve illicites sont interdits
Au cours d’un litige, il peut être tentant pour l’une comme pour l’autre des parties d’utiliser certains procédés pour appuyer leur version des faits, comme la production de documents de l’entreprise par le salarié, ou encore l’enregistrement d’une conversation téléphonique. Ces modes de preuve peuvent rapidement devenir déloyaux et leur recevabilité est donc strictement encadrée par les juges.
S’agissant de la production de documents de l’entreprise par le salarié, la Cour de cassation impose depuis 2004 le respect de plusieurs conditions:
- les documents doivent être strictement nécessaires à la défense du salarié dans le litige l’opposant à son employeur;
- le salarié doit avoir eu connaissance de ces documents à l’occasion de l’exercice de ses fonctions et ne doit pas avoir rusé pour les obtenir. Les documents confidentiels produits par un salarié qui n’ont jamais été mis à sa disposition seront donc écartés des débats.
Dans le litige en cause en 2004, une salariée comptable contestant le bien fondé de son licenciement, avait produit devant le Conseil des Prud’hommes deux bulletins de salaires et la photocopie de divers documents auxquels elle avait régulièrement accès dans le cadre de ses fonctions. Les juges du fond ont estimé que l’intention de porter atteinte à la propriété de l’employeur n’était pas établi.
Ces deux conditions sont cumulatives, et les documents seront écartés des débats s’ils ne les respectent pas.
S’agissant des enregistrements de conversations téléphoniques, ils sont irrecevables s’ils ont été réalisés à l’insu de l’auteur des propos. A l’inverse, un message laissé sur un répondeur pourra valablement être utilisé par les parties, l’auteur du message ne pouvant ignorer la possibilité offerte au destinataire de l’appel de conserver l’enregistrement.
Nouvelles technologies de communication et preuves devant le Conseil des Prud’hommes
Qu’en est-il des SMS? Selon la Cour de cassation, ils constituent un mode de preuve recevable en justice. Comme pour le message laissé sur un répondeur, les juges estiment que l’auteur des messages ne peut pas ignorer qu’ils sont conservés après lecture dans l’appareil récepteur et que leur éventuelle relecture est possible. Ils ont ainsi admis la recevabilité de SMS dans une affaire relative à une salariée licenciée pour faute grave qui faisait état d’un harcèlement sexuel dont elle avait fait l’objet de la part de son employeur.
Qu’en est-il de Facebook? La liberté d’expression hors de l’entreprise et notamment sur les réseaux sociaux est une affaire sensible et très actuelle. Par un arrêt du 10 avril 2013, la Cour de cassation considère que les sites Facebook et MSN constituent des espaces privés dès lors qu’ils ne sont « accessibles qu’aux seules personnes agréées par l’intéressée, en nombre très restreint ». La preuve d’abus tirée de ces moyens de communication était ainsi irrecevable. La solution dépend donc, pour l’heure, du paramétrage des comptes.
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