Dans le cadre de son pouvoir disciplinaire, l’employeur est autorisé à prononcer des sanctions à l’encontre de ses salariés. Ce pouvoir est encadré par une procédure permettant certaines garanties aux salariés mais ces règles ne trouvent à s’appliquer que lorsque l’employeur prononce une sanction telle qu’un avertissement. Or, les observations verbales et les lettres de mise au point ne sont pas des sanctions.
Le régime juridique des observations verbales de l’employeur
Selon l’article L. 1331-1 du Code du travail, « constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération. »
Les observations verbales telles que les réprimandes, rappels à l’ordre et lettres de mise au point, ne sont pas des sanctions. L’employeur n’a donc pas à respecter de procédure particulière pour les formuler. Il pourra d’ailleurs utiliser ces observations à l’occasion d’une procédure disciplinaire pour des faits de même nature.
Dans ce contexte, les intérêts de l’employeur et du salarié sont contradictoires: puisque le salarié ne peut pas être sanctionné deux fois pour les mêmes faits en vertu du principe de non-cumul des sanctions, il est dans l’intérêt de l’employeur qui rédige une lettre de mise au point de ne pas voir cette lettre considérée par les juges, lors d’un litige, comme un avertissement qui, lui, est une sanction. Si les juges requalifient une lettre de mise au point en avertissement, l’employeur ne pourra plus sanctionner le salarié pour les mêmes faits reprochés dans la lettre de mise au point.
Par exemple, constitue une observation verbale, et non un avertissement, le fait pour l’employeur de demander à ses salariés d’éviter les appels téléphoniques pendant leur activité professionnelle.
Le régime juridique de l’avertissement
L’avertissement constitue une sanction disciplinaire mineure prononcée pour une faute isolée et dont le but est mettre en garde le salarié afin qu’il ne reproduise plus les faits fautifs. Par exemple, un salarié arrive systématiquement en retard ou n’exécute pas correctement les tâches indiquées dans son contrat. A ce titre, l’employeur doit veiller à bien suivre la procédure sous peine de voir sa sanction annulée.
Dans la mesure où l’avertissement n’a aucune incidence, immédiate ou non, sur la présence du salarié dans l’entreprise, sur sa fonction, sa carrière ou sa rémunération, l’employeur n’est pas tenu de le convoquer à un entretien préalable. Toutefois, il devra obligatoirement informer son salarié de son avertissement par lettre recommandée avec accusé de réception ou par une remise en main propre contre décharge. Cette lettre doit être motivée et mentionner explicitement qu’il s’agit d’un avertissement, même si les juges pourront décider de requalifier une lettre de mise au point ne comportant pas cette mention en avertissement en raison de son contenu.
L’employeur est aussi tenu de respecter certains délais: il doit notamment notifier la sanction au salarié dans les 2 mois depuis le jour où il a eu connaissance de la faute.
Le pouvoir des juges en cas de litige
Si un salarié décide d’intenter une action en justice à la suite d’un avertissement, les juges apprécieront la situation au vu des faits reprochés au salarié, de la sanction et de la régularité de la procédure suivie. Ils pourront annuler la sanction s’ils l’estiment disproportionnée, non motivée ou irrégulière en la forme.
S’agissant de la distinction entre une lettre de mise au point et un avertissement, la frontière est parfois mince et les juges n’hésitent pas à requalifier une lettre de mise au point en avertissement quand le courrier sanctionne un comportement fautif.
Par exemple, dans un courriel électronique, l’employeur reprochait à une de ses salariées des manquements aux règles et procédures internes à la banque relatives à la sécurité des paiements par carte bleue, et l’invitait de manière impérative à se conformer à ces règles et ne pas poursuivre ce genre de pratique. Courriel de mise au point pour l’employeur, avertissement pour les juges, de sorte que le licenciement prononcé à la suite de ces faits était sans cause réelle et sérieuse car constitutif d’une seconde sanction appliquée aux mêmes faits.
Remarque:
La requalification d’une lettre de mise au point en avertissement a d’autres conséquences pour l’employeur: outre le fait qu’il ne pourra plus prononcer d’autre sanction pour les mêmes faits, l’avertissement ne pourra plus être invoqué au bout de 3 ans car il sera prescrit.
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