La question de la rémunération liée aux primes d’objectifs est controversée. S’il est acquis que la rémunération contractuelle, fixe ou variable, ne peut pas faire l’objet de modifications sans l’accord du salarié, les objectifs ont peu à peu été « décontractualisés » ; l’employeur peut donc, sous certaines conditions, réviser les objectifs du salarié unilatéralement, et ce sans accord de ce dernier.
Rigidité du contrat et primes d’objectifs
Depuis 2001, la Cour de cassation estime que « les objectifs peuvent être définis unilatéralement par l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction ». En 2011, elle s’est à nouveau prononcée, pour affirmer que « lorsque les objectifs à réaliser pour bénéficier d’une prime sont définis unilatéralement par l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, celui-ci peut les modifier dès lors qu’ils sont réalisables ». Ces arrêts sonnent le glas de la contractualisation des objectifs. Ils impliquent que l’employeur peut décider seul des objectifs à atteindre par le salarié.
Mais attention: plusieurs conditions doivent être respectées par l’employeur:
- la prime d’objectifs doit être fondée sur des éléments objectifs et réalistes;
- les objectifs doivent avoir été portés à la connaissance du salarié en début d’exercice;
- les objectifs doivent être indépendants de la volonté de l’employeur;
- l’employeur doit fournir au salarié les moyens de les réaliser.
Si ces conditions sont réunies (au moins les 2 premières), le salarié n’aura pas à donner son accord, bien que cette modification ait une incidence sur la part variable de sa rémunération.
A contrario, si l’employeur souhaite rémunérer ses salariés avec des primes d’objectifs, il est tenu de son côté de fixer effectivement des objectifs… sous peine de voir le salarié prendre acte de la rupture de son contrat de travail puisque ce défaut de fixation des objectifs constitue un manquement empêchant la poursuite du contrat de travail.
La modification par l’employeur de la part variable de la rémunération
La rémunération contractuelle ou son mode de calcul ne peuvent être modifiés sans l’accord du salarié; il en va ainsi lorsque la modification porte sur la partie variable du salaire puisque, dans ce cas, la structure de la rémunération sera modifiée.
Il est interdit à l’employeur d’imposer de telles modifications au salarié, qui pourra:
- saisir la juridiction prud’homale en référé pour demander le rétablissement de son salaire initial;
- prendre acte de la rupture ou demander la résiliation judiciaire de son contrat;
- demander un rappel de salaire.
Toutefois, il est possible pour l’employeur d’insérer une clause de variation du salaire. Elle permettra de revoir le taux et les modalités de calcul de la partie variable du salaire.
Attention: pour être licite, une telle clause:
- doit être fondée sur des éléments objectifs indépendants de la volonté de l’employeur, c’est-à-dire qu’elle ne doit pas faire référence à des éléments dont seul l’employeur a la maîtrise;
- ne doit pas faire peser le risque de l’entreprise sur le salarié;
- ne doit pas avoir pour effet de réduire la rémunération du salarié en dessous des minima légaux et conventionnels.
La rémunération devra toujours comporter une partie fixe équivalente au SMIC.
Par ailleurs, une clause du contrat de travail ne peut en aucun cas permettre à l’employeur de modifier unilatéralement la rémunération du salarié. Une telle clause de variation du salaire serait illicite puisqu’elle ferait dépendre la variation de la rémunération du salarié d’éléments dépendant de la seule volonté de l’employeur.
Par exemple, dans une affaire, un employeur avait inséré une clause dans le contrat de travail d’un salarié lui permettant de modifier à tout moment son secteur d’intervention. La mise en œuvre de cette clause ayant eu une incidence sur la rémunération du salarié, les juges ont décidé que l’employeur avait modifié unilatéralement la rémunération et que le salarié était donc fondé à prendre acte de la rupture de son contrat aux torts de l’employeur.
Remarque:
Il faut cependant être prudent au regard des évolutions récentes de la jurisprudence, qui estime désormais que la modification par l’employeur du mode de calcul de la rémunération du salarié ne justifie pas une résiliation judiciaire du contrat de travail automatique lorsqu’elle n’entraîne aucune baisse de rémunération ou une baisse négligeable.
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