Au cours de la relation de travail, l’employeur peut souhaiter modifier le salaire du salarié. Depuis le milieu des années 1990, les juges opèrent un contrôle très strict de modifications dans la relation de travail; ils ont décidé de nommer « modification du contrat de travail » toute modification d’un élément contractuel, qui requiert l’accord du salarié, et « changement des conditions de travail » d’autres aspects de la relation de travail qui peuvent être modifiés unilatéralement. Le salaire fait partie des aspects contractuels de la relation de travail.
Le principe: pas de modification sans accord du salarié
La rémunération contractuelle est un élément du contrat de travail du salarié. Cela signifie que toute modification dans sa structure, son montant, ou son mode de calcul, doit se faire avec l’accord du salarié. Les juges sont stricts et le contentieux opposant employeurs et salariés à ce sujet est abondant:
- l’employeur ne peut pas modifier le mode de rémunération, même s’il considère que le nouveau mode est plus avantageux ou si la modification ne porte que sur la part variable du salaire. Par exemple, l’employeur ne peut pas substituer des stock-options à une partie de la rémunération variable, ou encore réduire la partie fixe du salaire, et élargir la partie variable en compensation, sans accord du salarié;
- l’employeur ne peut pas intégrer une prime conventionnelle résultant d’un nouvel accord collectif dans la rémunération contractuelle du salarié sans son accord;
- l’employeur ne peut pas baisser le salaire en application d’une convention collective réduisant la durée du travail sans acceptation claire et non équivoque de chaque salarié;
- il y a modification du contrat dès lors que l’on supprime un avantage en nature à un salarié, comme un véhicule de fonction;
- si l’employeur procède à une mutation d’un salarié en application d’une clause de mobilité, cela ne peut avoir pour effet de modifier indirectement la part variable du salaire.
Mais seule la partie non déterminée par le statut collectif est contractuelle
Autrement dit, la partie de la rémunération déterminée par le statut collectif, l’usage ou la convention collective n’est pas contractuelle. Par exemple, si une prime ou un complément de salaire est prévu par un engagement unilatéral, l’élément de salaire peut être détruit par une dénonciation de l’employeur.
Pour les juges, tout élément résultant d’une source spéciale et distincte, ne fait pas partie du contrat individuel de travail; l’accord du salarié ne sera donc pas nécessaire.
En tout état de cause, si l’employeur modifie un élément contractuel, et que le salarié continue à travailler aux nouvelles conditions de salaire, cette continuation ne suffit pas à présumer l’accord du salarié qui doit être exprès (par un courrier, ou la signature d’un avenant). Peu importe que le silence du salarié dure plusieurs mois, voire plusieurs années.
Le refus par le salarié d’une modification de son contrat
L’employeur a dans ce cas 2 solutions:
- renoncer à son projet;
- licencier le salarié. Attention! le refus du salarié d’une modification de son contrat de travail ne peut pas constituer le motif du licenciement. La raison à l’origine de la proposition de modification constitue le motif, et les juges vérifieront son caractère réel et sérieux.
Du côté du salarié qui se voit imposer une modification de son contrat, il peut:
- exiger de poursuivre le contrat aux conditions antérieures;
- faire constater la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur, par le biais de la prise d’acte de la rupture, ou la résiliation judiciaire du contrat de travail. Là aussi, les salariés doivent être prudents: les juges ont récemment estimé que la modification du salaire doit être de nature à empêcher la rupture de la relation contractuelle et qu’une faible incidence sur la rémunération du salarié n’est pas suffisante.
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