Conséquences de la grève pour les grévistes

La grève ne rompt pas le contrat de travail, sauf faute lourde du salarié gréviste. La loi n° 85-772 du 25 juillet 1985 affirme le principe selon lequel tout licenciement prononcé pour fait de grève est nul de plein droit. Cette nullité s’étend à tous les actes commis durant la grève, s’ils ne sont pas qualifiés de faute lourde.Le tribunal, ayant déclaré le licenciement nul, peut ordonner la réintégration du salarié licencié, celui-ci devant alors toucher une indemnisation égale au salaire correspondant à la période comprise entre son licen­ciement et sa réintégration.

De plus, l’employeur ne peut prendre aucune autre sanction disciplinaire contre les grévistes, hormis le cas de faute lourde.

La grève suspend le contrat de travail.

La récupération des heures perdues en cas de grève interne n’est, en principe, pas possible. En cas de grève externe, la récupération devient licite.

Puisque l’exécution du travail est interrompue, l’employeur peut retenir sur la paie des grévistes la part du salaire et des compléments et accessoires du salaire corres­pondant à la durée de la grève.

Si les salariés ont effectué un débrayage d’un quart d’heure, l’employeur ne peut retenir sur leur paie que le salaire correspondant à ce quart d’heure. Il ne pourrait leur retenir une demi-heure sous prétexte qu’après le débrayage il a fallu un quart d’heure de remise en route pour que la production devienne effective.

Pour les salariés rémunérés selon un forfait en jours, l’employeur doit déterminer le salaire horaire des intéressés pour opérer un abattement proportionnel à la durée de l’arrêt de travail.

L’employeur ne peut opérer, à la suite d’une grève, des discriminations en matière de rémunération et d’avantages sociaux entre les grévistes et les non-grévistes.

Il n’a pas non plus le droit de verser aux seuls ouvriers non grévistes une prime ou un avantage quelconque pour les récompenser de ne pas avoir fait la grève. Il peut verser une prime pour surcharge de travail aux salariés non grévistes, à condition cependant que seuls les salariés ayant réellement subi une surcharge de travail la perçoivent.

En revanche, l’employeur peut supprimer ou diminuer les primes accordées sous condition de présence aux salariés grévistes. Dans ce cas-là, il faut que toutes les absences autres que celles légalement assimilées à un temps de travail effectif entraî­nent les mêmes conséquences. L’employeur ne peut ainsi réduire la prime d’ancien­neté d’un salarié gréviste alors que les absences pour maladie n’entraînent pas un tel abattement. A l’inverse, un employeur a été autorisé à diminuer le montant d’une prime d’assiduité alors que seules les absences pour jours RTT, pour congés payés et de formation économique et syn­dicale (assimilées à un temps de travail effectif) n’entraînaient pas d’abattement.

L’employeur, de son côté, ne peut pas réclamer devant les tribunaux des dommages et intérêts pour les préjudices que lui a causés une grève (sauf s’il s’agit d’une grève illicite).

La loi interdit à l’employeur de faire appel à des travailleurs sous contrat à durée déterminée, ou temporaires, pour remplacer des salariés grévistes, y compris pour remplacer des salariés non grévistes qui sont eux-mêmes affectés aux postes de grévistes.

L’embauche précédant la grève est licite sauf si ce recrutement a été effectué dans la perspective de la grève.

En revanche, le recrutement en vue de travaux autres que ceux des grévistes, de tra­vailleurs sous contrat à durée déterminée, ou temporaires, est licite, de même que l’embauche après la fin du conflit afin de faire face à un surcroît d’activité.

Mis à part ces interdictions, l’employeur peut faire appel aux salariés non grévistes de l’entreprise pour maintenir l’activité de celle-ci, à la condition que les salariés appelés à de nouvelles tâches provisoires ne voient pas leur contrat de travail modifié substantiellement : ils seraient alors en droit de refuser.

A priori, l’employeur peut même engager de nouveaux travailleurs sous contrat à durée indéterminée, pour pallier les conséquences de la grève sur l’activité, mais il lui sera, dans ce cas, difficile de procéder à leur licenciement lorsque les salariés gré­vistes réintégreront de droit l’entreprise.

La jurisprudence a par ailleurs confirmé que l’employeur peut avoir recours à des bénévoles pour assurer le travail des salariés grévistes .

Selon la loi sur la sécurité intérieure du 18 mars 2003, le préfet est autorisé à réqui­sitionner des salariés grévistes en cas d’urgence et lorsque l’atteinte à l’ordre, à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité l’exige.

Le Conseil d’État a précisé que le préfet 0 ne peut toutefois prendre que les mesures imposées par l’urgence et proportionnées aux nécessités de l’ordre public. Il a ainsi désapprouvé le préfet d’Indre-et-Loire ayant réquisi­tionné l’ensemble des sages-femmes en grève dans une clinique privée sans envi­sager le redéploiement d’activités vers d’autres établissements ou le fonctionnement réduit du service, et sans rechercher si les besoins essentiels de la population ne pou­vaient être autrement satisfaits compte tenu des capacités sanitaires du département.

Les conséquences de la grève pour tes non-grévistes

Les salariés qui ont manifesté leur intention de ne pas participer à la grève doi­vent recevoir la totalité de leur rémunération pendant toute la durée de la grève et ce, même si la présence de piquets de grève ou la désorganisation totale de la pro­duction les met dans l’impossibilité matérielle d’effectuer leur travail.

Cependant, si l’employeur réussit à apporter la preuve de l’impossibilité absolue de fournir du travail aux non-grévistes en dépit de ses efforts soutenus pour réorganiser la production, il est dispensé de son obligation de paiement des salaires aux non-grévistes.

Lorsque les locaux de son entreprise sont occupés ou que des piquets de grève en interdisent l’entrée, l’employeur peut se faire relever de son obligation de payer les salariés non grévistes s’il prouve qu’il a demandé aux tribunaux un jugement ordon­nant l’évacuation des piquets de grève ou des occupants.

Dans ces cas, les salariés non grévistes, qui ont été empêchés de travailler, peuvent intenter une action en justice contre les grévistes ou leur syndicat (si celui-ci est res­ponsable de cette situation) pour demander réparation de la perte de salaire qu’ils ont subie.

IMPORTANT

  • À la reprise du travail, les grévistes et l’employeur peuvent convenir que tout ou partie du temps de grève sera payé ou récupéré.
  • Le gréviste garde sa qualité d’assuré social quelle que soit la durée du con­flit. En revanche, il n’est plus protégé par la législation sur les accidents du travail ou du trajet.