La simple possibilité d’une dégradation des conditions de travail de la victime suffit à consommer le délit de harcèlement moral. Peu importe également que la personne poursuivie soit le subordonné ou le supérieur hiérarchique de la victime.

A la suite du suicide de M. X…, chef d’un service d’action sociale territoriale, M. Y…, éducateur au sein du même service, a été cité à comparaître devant le tribunal correctionnel, sur le fondement de l’article 222-33-2 du code pénal, pour les raisons suivantes :

–          l’avoir harcelé M. X… en dévalorisant de façon réitérée son action,

–          avoir diffusé à son propos une image d’incompétence dans son milieu professionnel

–          avoir adopté à son égard un comportement irrévérencieux et méprisant.

Le tribunal correctionnel a reconnu le harcèlement en déclarant que « le dénigrement auquel s’était livré le prévenu pendant plusieurs années avait contribué à dégrader les conditions de travail de M. X…, au point d’altérer sa santé physique ou mentale et de compromettre son avenir professionnel ».

Dans un arrêt du 11 mars 2010, la Cour d’appel de Poitiers revient sur la décision du tribunal correctionnel au motif que pour constituer le délit de harcèlement moral, les agissements commis doivent avoir nécessairement porté atteinte aux droits, à la dignité de la victime, ou altéré sa santé physique ou mentale, ou encore compromis son avenir professionnel. Elle relève également que le prévenu, subordonné de la victime, n’avait ni les qualités ni les moyens de compromettre l’avenir professionnel de celle-ci, et qu’aucun élément de la procédure ne permet d’établir que les faits en cause aient été à l’origine d’une dégradation physique ou mentale du défunt

Dans un arrêt du 6 décembre 2011, la Cour de cassation casse l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Poitiers en déclarant qu’elle avait ajouté à la loi des conditions qu’elle ne comportait pas à savoir :

–          Retenir que les conséquences de la dégradation des conditions de travail devaient être avérées, alors que la simple possibilité de cette dégradation suffit à consommer le délit de harcèlement moral ;

–          Subordonner le délit à l’existence d’un pouvoir hiérarchique, alors que le fait que la personne poursuivie soit le subordonné de la victime est indifférent à la caractérisation de l’infraction.