Un propriétaire peut-il se protéger contre le risque de la perte de garantie consécutif au divorce de ses locataires ? Il peut arriver qu’un propriétaire n’accepte la location d’un appartement ou d’une maison que parce qu’il loue le bien non pas à un seul mais bien aux deux époux. Cette solution est d’autant plus vraie lorsqu’il n’y a qu’un seul des époux qui dispose de revenus et que l’autre soit ne travaille pas, soit a des revenus ne permettant pas d’assumer le coût du logement. Quelle est la position de la Cour de Cassation à ce sujet.

Dans cette affaire, un propriétaire avait loué un bien immobilier à deux époux. Le contrat de bail était cosigné par chacun d’eux et une clause de solidarité du paiement des loyers y avait été insérée. Aussi, s’ajoutait à la solidarité légale au titre du mariage, une solidarité conventionnelle. Les époux se séparent finalement et divorcent. Dès lors, il apparaît tout à fait logique que la solidarité légale disparaisse du fait du prononcé du divorce. Le juge aux affaires familiales comme les époux dans le cadre du divorce sans juge ont la capacité de prévoir qui conservera le domicile conjugal. Mais qu’en était-il s’agissant de la solidarité conventionnelle complémentaire auquel faisait référence expressément le bail ?

Solution de la Cour

On se trouve ici confronté comme le rappelle le professeur Jean HAUSER à la dualité entre l’intérêt de l’époux qui quitte le logement familial et considère qu’il n’est plus tenu à payer le loyer d’un logement qu’il n’occupe plus et de l’autre celui du bailleur qui n’aurait vraisemblablement jamais consenti à louer son bien immobilier si seul l’époux restant dans le bien s’était présenté seul.
La Cour de Cassation nous apporte une solution particulièrement tranchée sur la question en déclarant que « la transcription du jugement de divorce ayant attribué le droit au bail à l’un des époux met fin à la cotitularité du bail tant légale que conventionnelle. »

Critique

Cet arrêt nous paraît critiquable à plus d’un titre.
Son caractère purement lapidaire et sans aucune explication ne peut que nous étonner. Il reste néanmoins topique de la Cour.
Que fait-on finalement de la force obligatoire des contrats liant les parties ?

Deux situations nous semblaient devoir se dégager :
Premier cas, bailleur et époux n’ont rien prévu de particulier dans le contrat de bail d’habitation, celui-ci étant uniquement signé par les deux époux. Dans pareille situation, Il est tout à fait logique et concevable que le jugement de divorce impose au propriétaire lequel des époux reste dans le bien à défaut de disposition expresse contraire.

Cependant, à l’inverse, deuxième cas – qui était le cas d’espèce – lorsqu’une clause dans le contrat de bail vient expressément indiquer que le propriétaire n’aurait en quelque sorte jamais consenti à bail si les deux époux n’étaient pas solidairement responsables quelle que soit l’évolution de leur relation matrimoniale, il nous paraît tout à fait logique que dans pareille situation, la solidarité conventionnelle vienne poursuivre la solidarité légale.