Les différentes catégories de primes

Il existe un nombre pratiquement illimité de primes pouvant venir en complé­ment du salaire.

Du 13e mois à la prime de vacances, des primes d’assiduité aux primes de salissure : il serait vain de tenter d’en faire une énumération exhaustive !

Il est en revanche possible de classer les primes selon leur source juridique. On dis­tingue ainsi :

Les primes dites « contractuelles »

Les primes prévues par les conventions ou les accords collectifs ainsi que par le contrat individuel de travail sont toujours contractuelles et font partie du salaire. Leur existence découle d’un écrit et n’est donc pas difficile à prouver. La situation est plus délicate pour les primes qui résultent d’un usage, c’est-à-dire d’une pratique non formalisée par écrit. La jurisprudence qui a eu à se prononcer à maintes reprises sur ce problème a fixé les critères à considérer pour qu’une prime découlant d’un usage puisse être considérée comme contractuelle. Ces critères sont au nombre de trois : la constance, la fixité et la généralité.

Pour qu’une prime découlant d’un usage devienne un élément permanent du salaire, il faut donc :

  • qu’elle ait été accordée un certain nombre de fois. Ne peut être considérée comme constante une prime annuelle versée une seule fois ou même deux fois ou encore une prime mensuelle ver­sée pendant trois mois. Une prime de fin d’année ver­sée pendant trois ans consécutifs acquiert un caractère de constance ;
  • qu’elle ait été calculée chaque fois selon les mêmes modalités. Il n’est pas néces­saire que son montant soit resté invariable mais il faut que celui-ci ait évolué selon des paramètres déterminés, comme le salaire ou le chiffre d’affaires de l’entreprise par exemple. Une prime versée en fonction de facteurs purement subjectifs comme la compétence ou le mérite des salariés ne constitue pas un élément du salaire ;
  • et enfin qu’elle ait été versée à l’ensemble du personnel ou à une catégorie du per­sonnel bien déterminée, ce qui exclut, notamment, les primes versées à un seul sala­rié.

Une prime résultant de l’engagement de l’employeur peut également être considé­rée comme contractuelle lorsqu’elle est de portée collective (note, circulaire, recom­mandation patronale…).

La Cour de cassation a ainsi décidé qu’un employeur était tenu de verser à ses sala­riés la prime de 3 000 F (457,35 €) prévue par la recommandation des organisa­tions patronales, prise à la suite de l’échec des négociations salariales lors du conflit de novembre 1996 dans le secteur des transports routiers.

Les primes dites « bénévoles »

Elles ne répondent pas aux critères ci-dessus. L’employeur peut décider en toute liberté de leur versement et de leur montant.

Ce type de prime n’échappe toutefois pas totalement au contrôle des juges. La Cour de cassation a ainsi donné raison à un salarié qui réclamait un rappel de salaire au motif que le montant de la prime annuelle qu’il recevait diminuait d’année en année alors que les primes de ses collègues augmentaient. Les juges ont considéré que l’employeur ne pouvait « opposer son pouvoir discrétionnaire pour se soustraire à l’obligation de justifier de façon objective et pertinente une différence de rémunéra­tion entre ses employés.

Primes et gratifications : le régime juridique et social

Les primes et gratifications sont soumises à cotisations sociales, sauf lorsqu’elles représentent un remboursement de frais professionnels réellement exposés par le salarié ou la réparation d’un préjudice. Elles sont prises en compte dans le calcul de la majoration pour heures supplémen­taires lorsqu’elles sont inhérentes à la nature du travail.

Le montant des primes doit être inclus dans le calcul de l’indemnité de congés payés lorsqu’elles sont accordées en contrepartie du travail, qu’elles ne couvrent pas un risque exceptionnel et n’indemnisent pas déjà la période de congé considérée. Les primes contractuelles sont prises en compte pour vérifier si la rémunération du salarié correspond bien au SMIC ou au minimum prévu par sa con­vention collective.

Enfin, ces primes entrent en compte dans le calcul de l’indemnité compensatrice de préavis et de l’indemnité de licenciement.

La suppression des primes et gratifications

Un employeur peut toujours décider de supprimer une prime bénévole à ses employés. Cette décision est sans recours sauf pour un salarié qui peut prouver qu’il a été victime d’une discrimination. Tel est le cas d’une salariée n’ayant pas reçu sa prime alors qu’elle a annoncé qu’elle était enceinte par exemple, ses collègues ayant continué à la percevoir.

En revanche, l’employeur ne peut décider unilatéralement de supprimer une prime contractuelle :

  • si cette prime découle d’une convention ou d’un accord collectif, il doit, pour ce faire, dénoncer préalablement l’accord dans les règles. Si aucun accord de substitution n’est signé, passé le délai de survie de l’ancienne convention ou accord, la prime est considérée comme un avantage acquis qui s’intègre au contrat de travail et doit être maintenue ;
  • si elle résulte d’un usage ou de sa décision unilatérale, il doit respecter la procédure prévue pour la dénonciation d’un usage. Si l’usage est régulièrement dénoncé, la prime ne peut être maintenue ;
  • si la prime résulte d’une clause comprise dans le contrat de travail, sa suppression peut être considérée comme une modification d’un élément essentiel du contrat.

ATTENTION

Si le versement de la prime est lié à certaines conditions, clairement défi­nies, l’employeur est alors en droit de supprimer cette prime lorsque ces conditions ne sont pas réunies. Il en est ainsi, par exemple, d’une prime d’objectifs lorsque l’intéressé n’a pas réalisé les objectifs impartis. Un salarié a cependant obtenu le paiement d’une telle prime auprès des tribunaux. En effet, alors que son contrat de travail prévoyait que les objectifs devaient être fixés annuellement d’un commun accord, aucune négo­ciation n’avait été engagée en début d’année dans ce sens. Dans un tel cas, le montant de la prime est fixé par le juge.

L’employeur n’est pas autorisé à diminuer ou supprimer une prime à titre discipli­naire, sauf en cas de mise à pied, lorsque l’attribution de cette prime est soumise à une condition de présence.

Suppression de primes en cas d’absence ou de départ du salarié en cours d’année

Suppression de primes en cas d’absence du salarié

Il convient, là encore, de faire la différence entre les primes bénévoles et les pri­mes contractuelles.

Les primes bénévoles

Lorsque la prime peut être considérée comme bénévole, l’employeur peut décider de la maintenir ou de la supprimer aux salariés absents, en toute liberté.

Les primes contractuelles

Lorsque la prime est de nature contractuelle, il faut alors vérifier si le texte qui l’instaure prévoit des dispositions particulières en la matière.

Si une convention collective exige que le salarié soit présent dans l’entreprise au moment de son versement, un salarié absent ne peut alors en réclamer le bénéfice.

Lorsqu’aucune condition de présence n’est exigée, la prime est alors due.

Elle peut cependant subir un abattement proportionnel au temps d’absence lorsqu’elle a pour objet de rémunérer une activité effective ou lorsqu’elle est calculée au prorata des jours de présence : prime d’assiduité, de rendement, de productivité, par exemple. Attention : certaines absences (maladie, maternité, accident…) sont assimilées à un temps de travail effectif par la loi ou par les conventions collectives pour l’attribution de certaines primes. Lorsque l’absence du salarié est assimilée à un temps de travail effectif, aucun abattement ne doit être opéré sur les primes considérées.

Si la prime n’est pas liée à l’activité du salarié, elle doit lui être versée dans son intégralité.

La suppression de primes en cas de départ du salarié en cours d’année

Les mêmes règles s’appliquent en cas de rupture du contrat de travail : si l’octroi de la prime est subordonné à la condition d’appartenance du salarié à l’entreprise au moment de son versement, elle n’est pas due aux salariés démission­naires ou licenciés.

Les autres primes peuvent être versées au prorata de la durée de présence, mais unique­ment si un texte (convention collective, contrat de travail…) ou un usage le prévoit. En cas de contestation, le salarié doit prouver l’existence de ce texte ou de cet usage.