La fiscalité de la prestation compensatoire doit faire l’objet chez les époux qui ont décidé de divorcer d’une attention toute particulière. Cela se comprend d’autant plus eu égard à la période de crise que nous connaissons depuis 2008. C’est le nombre sans cesse croissant de clients venant nous interroger sur cette question qui nous a amené à écrire ce petit article sans prétention aucune mais qui vous permettra d’y voir un peu plus clair dans les arcanes de la fiscalité de la prestation compensatoire.

A titre liminaire, il est important de rappeler que la fiscalité de la prestation compensatoire ne tient pas compte du type de procédure de divorce qui a été engagée. Que votre prestation compensatoire soit prévue dans le cadre d’une convention de divorce homologuée par le juge aux affaires familiales (divorce par consentement mutuel) ou à la suite d’une procédure de divorce contentieux (divorce pour faute, divorce accepté, ou divorce pour altération définitive du lien conjugal), les règles fiscales ne changeront pas. Seule compte en réalité la forme que revêt la prestation compensatoire :

  • prestation compensatoire sous forme de rente viagère
  • prestation compensatoire sous forme de capital

Et là encore, vous allez voir que l’Administration fiscale a ajouté quelques subtilités d’importance puisqu’elle tient compte du bien cédé (somme d’argent, bien bien immobilier…) et du fait qu’il s’agit d’un bien propre ou d’un bien commun.

Trois types d’impôts peuvent entrer en ligne de compte :

  • l’impôt sur le revenu
  • les droits d’enregistrement
  • la taxe de publicité foncière

Nous allons étudier maintenant les deux situations classiques généralement prévues en cas de prestation compensatoire avant d’envisager  quelques cas particuliers. A la suite de cet article, nous espérons que vous aurez pu sentir la philosophie des règles fiscales dans ce domaine.

La fiscalité de la prestation compensatoire sous forme de rente viagère (somme d’argent)

La rente viagère consiste dans le versement d’une rente jusqu’au décès de son bénéficiaire.
Comme l’indique le Ministère de la Justice, depuis 2004, « les rentes viagères sont généralement allouées aux couples qui divorcent après plus de trente ans de mariage et qui disposent de revenus mensuels assez faibles : en moyenne 2 350 € pour le débiteur et surtout 764 € pour le bénéficiaire « .

Dans ce cas de figure, la fiscalité de la prestation compensatoire est alors :

  • DROITS D’ENREGISTREMENT : une exonération de droits d’enregistrement
  • PUBLICITE FONCIERE : aucun droit de publicité foncière à verser (l’opération ne porte pas sur des biens immobiliers)
  • IMPOT SUR LE REVENU :
    • imposition sur le revenu de la rente viagère versée pour le bénéficiaire,
    • déduction sur le revenu de la rente viagère versée pour le débiteur,

La fiscalité de la prestation compensatoire versée sous forme de capital (somme d’argent)

On dit que la prestation compensatoire est versée sous forme de capital lorsque la somme prévue est fixée à l’avance, le paiement pouvant se faire sous la forme d’un ou de plusieurs versements (ex. : prestation compensatoire pour une valeur globale de 120.000 euros versée sous la forme de 12 mensualités de 10.000 €).

En cas de prestation compensatoire sous forme de capital, la fiscalité distingue deux cas :

  • la prestation compensatoire versée sur une période supérieure à 12 mois à compter de la date du jugement de divorce
  • la prestation compensatoire versée immédiatement ou sur une période inférieure à 12 mois à compter de la date du jugement de divorce

PRECISION :
S’agissant de la période de 12 mois, il importe peu que celle-ci chevauche deux années civiles. L’administration fiscale tout comme la jurisprudence a sur ce point été particulièrement claire : on ne tient pas compte du fait que les versements de la prestation compensatoire s’intègre dans une année civile, seule compte que l’intégralité des versements soit réalisée dans les 12 mois à compter du jour où le jugement de divorce est devenu définitif.

La fiscalité de la prestation compensatoire versée sur une période supérieure à 12 mois à compter de la date du jugement de divorce

Lorsque la prestation compensatoire sous forme de capital est versée sur une période supérieure à 12 mois, la fiscalité qui s’applique aux versements est la même que pour les prestations compensatoire sous forme de rente viagère.

Aussi, a-t-on de même l’application des règles fiscales suivantes :

  • DROITS D’ENREGISTREMENT : une exonération de droits d’enregistrement
  • PUBLICITE FONCIERE : aucun droit de publicité foncière à verser (l’opération ne porte pas sur des biens immobiliers)
  • IMPOT SUR LE REVENU :
    • imposition sur le revenu de la prestation compensatoire versée pour le bénéficiaire,
    • déduction sur le revenu de la prestation compensatoire versée pour le débiteur,

La fiscalité de la prestation compensatoire versée immédiatement ou sur une période inférieure à 12 mois à compter de la date du jugement de divorce

Lorsque la prestation compensatoire sous forme de capital est versée sur une période inférieure à 12 mois, le régime fiscal est alors différent :

  • DROITS D’ENREGISTREMENT :
    • prestation compensatoire versée à l’aide de biens propres : droit fixe de 125 € quelle que soit la valeur de la prestation compensatoire versée
    • prestation compensatoire versée à l’aide de biens communs : droit de partage de 2,5 % sur l’intégralité de la somme versée au titre d ela prestation compensatoire.
  • PUBLICITE FONCIERE : aucun droit de publicité foncière à verser (l’opération ne porte pas sur des biens immobiliers)
  • IMPOT SUR LE REVENU :
    • pour le bénéficiaire : absence d’imposition sur le revenu pour la prestation compensatoire versée,
    • pour le débiteur : réduction d’impôt limitée à 25 % du montant de la prestation compensatoire (la réduction d’impôt ne pouvant excéder en tout état de cause 7.625 €)

La réduction d’impôt de 25 % est applicable même si la prestation compensatoire est versée en compensation avec une soulte.

La fiscalité des prestations compensatoires sous forme de capital consistant en l’attribution d’un bien mobilier ou immobilier

Il existe bien d’autres formes de prestations compensatoires que celles versées sous la forme d’« espèces sonnantes et trébuchantes ». Il est tout à fait possible, mais beaucoup plus rare, je vous le concède, de prévoir une prestation compensatoire consistant dans l’attribution d’un bien mobilier ou immobilier en nature.

On peut également prévoir l’attribution d’un bien mobilier ou immobilier « démembré », c’est-à-dire l’attribution de l’usufruit ou de la nu-propriété., ou d’un droit temporaire ou viager d’usage, d’habitation.

Qu’en est-il alors de la fiscalité de la prestation compensatoire ?

Il faut alors distinguer deux cas :

  • si la prestation compensatoire est réglée à l’aide de biens communs ou indivis (en cas de régime de séparation de biens)
  • si la prestation compensatoire est réglée à l’aide de biens propres ou personnels (en cas de régime de séparation de biens)

Entrons maintenant dans le vif du sujet :

La prestation compensatoire est réglée à l’aide de biens communs ou indivis (en cas de régime de séparation de biens)

On parle de biens communs lorsque les époux ont acquis un bien au cours du mariage et qu’aucun contrat de mariage n’a été signé (régime de la séparation de biens réduite aux acquêts à moins que le bien ait été acquis par le biais d’une clause de réemploi) ou qu’ils ont opté pour un contrat de communauté universelle.

On parle de biens indivis lorsque les époux en régime de séparation de biens exercent des droits de même nature sur un même bien (ex. : convention d’indivisionsur une maison ou un appartement)

Si vous entrez dans l’un ou l’autre de ces cas, la fiscalité de la prestation compensatoire est alors la suivante :

  • PUBLICITE FONCIERE : pas de publicité foncière
  • DROITS D’ENREGISTREMENT : droit de partage de 2,5 % sur la valeur du ou des bien(s) mobilier(s) ou immobilier(s) transmis à titre de prestation compensatoire
  • IMPOT SUR LE REVENU :
    • pour le bénéficiaire : absence d’imposition sur le revenu pour la prestation compensatoire versée,
    • pour le débiteur : réduction d’impôt limitée à 25 % du montant de la prestation compensatoire (la réduction d’impôt ne pouvant excéder en tout état de cause 7.625 €)

Si vous n’entrez pas dans l’un de ces deux cas de figure, vous entrez en principe dans l’un des cas de figure qui suivent.

La prestation compensatoire est réglée à l’aide de biens propres ou personnels (en cas de régime de séparation de biens)

On parle de biens propres lorsque le bien a été acquis et payé en intégralité avant mariage ou qu’il provient d’une donation ou d’une succession, sauf si vous êtes soumis à un contrat de communauté universelle (dans ce cas, il s’agit quand même d’un bien commun, sauf disposition contraire du contrat).

On parle de biens personnels pour les biens qui ont été acquis pendant le mariage par l’un des époux s’il est soumis à un régime de séparation de biens.

Dans ces cas de figure, voici la fiscalité de la prestation compensatoire en question :

  • PUBLICITE FONCIERE : taxe correspondant à 0,715 % de la valeur du bien (pour être précis : publicité foncière au taux de 0,7 % à laquelle il faut ajouter le prélèvement de 2,14 % pour frais d’assiette et de recouvrement)
  • DROITS D’ENREGISTREMENT : pas de droit d’enregistrement du fait de la présence de la taxe de publicité foncière
  • IMPOT SUR LE REVENU :
    • pour le bénéficiaire : absence d’imposition sur le revenu pour la prestation compensatoire versée,
    • pour le débiteur : en principe on devrait pouvoir obtenir la réduction d’impôt limitée à 25 % du montant de la prestation compensatoire (la réduction d’impôt ne pouvant excéder en tout état de cause 7.625 €). Cependant, pour les biens immobiliers en tout cas, dans ce cas de figure, une réponse ministérielle du 29 août 2006 indique que l’abandon de biens immobiliers propres constitue une cession à titre onéreux, ce qui signifie que le débiteur sera soumis à l’imposition au titre de la plus-value.

La fiscalité des « prestations compensatoires complexes »

Allons encore plus loin.

Vous pouvez tout à fait prévoir la combinaison de différentes formes de prestations compensatoires

On peut ainsi avoir :

  • une prestation compensatoire sous forme de capital consistant  en la combinaison de deux modalités de paiement du capital (versement d’une somme d’argent combinée avec l’abandon en pleine propriété d’un bien, d’un droit temporaire ou viager d’usage, d’habitation ou encore de l’usufruit d’un bien)
  • une prestation compensatoire sous forme mixte (versement d’une prestation compensatoire en capital combinée à une prestation compensatoire sous forme de rente viagère)

Etudions un peu tout cela.

La fiscalité de la prestation compensatoire sous forme de capital – combinaison de deux modalités de paiement du capital

La « prestation compensatoire sous forme mixte »

La prestation compensatoire sous forme mixte est une prestation compensatoire composée de deux partie.

Deux options sont possibles :

  • la première partie est un capital versé immédiatement et l’autre partie une rente viagère,
  • la première partie est un capital versé immédiatement l’autre partie un capital échelonné (paiement d’une somme fixe sur une durée déterminée)

La fiscalité de la prestation compensatoire composée d’un capital versé immédiatement et d’une rente viagère

Dans le premier cas de figure, une instruction non encore rapportée à ce jour de 2001 nous indique que la partie capital versée immédiatement ne bénéficie pas de la réduction d’impôt de 25 % et que la partie rente viagère suit sans changement la fiscalité de la prestation compensatoire versée sous forme de rente viagère.

De ce fait, la fiscalité de la prestation compensatoire est alors la suivante :

Pour la partie capital versé immédiatement 

  • PUBLICITE FONCIERE :
    • en cas de bien immobilier propre ou personnel : taxe correspondant à 0,715 % de la valeur du bien (pour être précis : publicité foncière au taux de 0,7 % à laquelle il faut ajouter le prélèvement de 2,14 % pour frais d’assiette et de recouvrement)
    • dans les autres cas : pas de publicité foncière
  • DROITS D’ENREGISTREMENT :
    • en cas de bien immobilier propre ou personnel : pas de droit d’enregistrement
    • en cas de biens mobiliers ou immobiliers communs ou indivis : droit de partage de 2,5 %
    • en cas de biens mobiliers propres ou personnels : droit fixe de 125 €
  • IMPOT SUR LE REVENU :
    • pour le bénéficiaire : absence d’imposition
    • pour le débiteur : pas de réduction d’impôt

Pour la partie versée sous forme de rente viagère

  • DROITS D’ENREGISTREMENT : une exonération de droits d’enregistrement
  • PUBLICITE FONCIERE : aucun droit de publicité foncière à verser
  • IMPOT SUR LE REVENU :
    • imposition sur le revenu de la rente viagère versée pour le bénéficiaire,
    • déduction sur le revenu de la rente viagère versée pour le débiteur,

La fiscalité de la prestation compensatoire composée d’un capital versé immédiatement et d’un capital échelonné

Dernier cas de figure dont nous nous intéresserons ici, la prestation compensatoire composée d’un capital versé immédiatement et d’une rente viagère.

L’administration fiscale ne nous a pas encore donné de réponse claire à ce sujet.

Cependant, si l’on suit la philosophie des règles régissant la matière, il y afort à penser que les deux parties de cette prestation compensatoire ne soient pas appréciées séparément et que l’administration la considère dans son intégralité. Ainsi, elle suivrait l’ensemble de la prestation compensatoire serait soumis au régime des prestations compensatoires sous forme de capital échelonné.

Ainsi, aurait-on indifféremment l’application de la fiscalité de la prestation compensatoire suivante :

  • DROITS D’ENREGISTREMENT : une exonération de droits d’enregistrement
  • PUBLICITE FONCIERE : aucun droit de publicité foncière à verser (l’opération ne porte pas sur des biens immobiliers)
  • IMPOT SUR LE REVENU :
    • imposition sur le revenu de la prestation compensatoire versée pour le bénéficiaire,
    • déduction sur le revenu de la prestation compensatoire versée pour le débiteur.

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